07/11/2018
Dans une affaire de veaux maintenus attachés par une corde et non une chaîne, la cour de justice européenne s'est prononcée (C‑187/07) le 3 avril 2008 sur la façon d'interpréter une disposition européenne qui pouvait prendre un sens différent selon les langues de traduction.
1 - La Cour a été saisie d'une demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation du terme «attacher», au sens du point 8 de l'annexe de la directive 91/629/CEE du Conseil, du 19 novembre 1991, établissant les normes minimales relatives à la protection des veaux, point 8 de l'annexe :«Les veaux ne sont pas attachés, à l’exception des veaux logés en groupe, qui peuvent être attachés durant des périodes d’une heure au maximum au moment de la distribution de lait ou d’un lactoremplaceur. Lorsque les veaux sont attachés, leur attache ne doit pas les blesser et doit être inspectée régulièrement et ajustée si nécessaire pour leur confort. Toute attache doit être conçue de manière à éviter un risque de strangulation ou de blessure et à permettre à l’animal de se déplacer conformément au point 7 [à savoir de s’étendre, de se reposer, de se relever et de faire sa toilette sans difficulté].»
2 - Devant sa juridiction nationale, l'éleveur néerlandais a fait valoir que les veaux étaient liés par le cou au moyen d’une corde et qu’ils ne pouvaient donc être regardés comme étant attachés au sens du point 8, première phrase, de l’annexe de la directive 91/629 car dans sa version en langue néerlandaise, ce point fait référence à la nature métallique de l’attache, en employant le mot «chaînes» («kettingen»).
3 - La Cour rappelle que le terme en question ne saurait être examiné dans la seule version en langue néerlandaise, les dispositions européennes devant être interprétées et appliquées de manière uniforme à la lumière des versions établies dans toutes les langues de l'Union européenne. La formulation utilisée dans une des versions linguistiques d’une disposition européenne ne saurait servir de base unique à l’interprétation de cette disposition ou se voir attribuer, à cet égard, un caractère prioritaire par rapport aux autres versions linguistiques. Une telle approche serait en effet incompatible avec l’exigence d’uniformité d’application du droit communautaire.
4 - En cas de disparité entre les diverses versions linguistiques d’un texte communautaire, la disposition en cause doit ainsi être interprétée en fonction de l’économie générale et de la finalité de la réglementation dont elle constitue un élément.
5 - Or, force est de constater que les versions linguistiques, autres que néerlandaise, du point 8 de l’annexe de la directive 91/629 ont recours à un terme général. À titre indicatif, la version en langue allemande emploie le terme «Anbindevorrichtung» (dispositif d’attache), la version en langue anglaise le mot «tether» (attache), la version en langue française le mot «attache», tandis que la version en langue italienne utilise le terme «attacco». Ce recours à un terme général est des plus logiques compte tenu, d’abord, de l’interdiction globale d’attacher les veaux lorsque ceux-ci sont logés dans des boxes individuels et, ensuite, du confort de l’animal exigé par la directive 91/629 lorsque, par exception, il est dérogé à cette interdiction pour les veaux logés en groupe, qui peuvent être attachés durant des périodes d’une heure au maximum au moment de la distribution de lait ou d’un lactoremplaceur […]». Le terme «chaîne» s’avère donc en contradiction avec l’objectif poursuivi par le législateur européen.
6 - Donc, au sens de la directive 91/629 modifiée, un veau est attaché lorsqu’il est retenu par un lien, quelles que soient la nature de ce lien.