31/03/2020
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2. Au mois de juin 2011, seize enfants du département du Nord ont présenté les symptômes d'un syndrome hémolytique et urémique (SHU), dû à la bactérie E-coli O157H7, susceptible d'engendrer une insuffisance rénale aigüe. Les investigations ont établi qu'ils avaient consommé de la viande hachée élaborée le 11 mai 2011 par la Société économique bragarde (société SEB) dont M. X... E... était le gérant depuis sa fondation en 1966 et vendue à la société LIDL. Elles ont également révélé que, sur les 13 unités de production dénommées "mêlées" fabriquées ce jour-là, seules 3 avaient fait l'objet d'une recherche en E-coli dont l'une avait donné un résultat non satisfaisant de 770 E-coli par gramme, dépassant le seuil de déclenchement de la recherche d'E-coli O157H7, fixé à 150 par gramme en application du plan de maîtrise sanitaire validé par l'administration (PMS 2). L'enquête a encore mis en évidence qu'aucune recherche de cette nature n'avait été effectuée, seules de nouvelles analyses en E-Coli ayant été réalisées, en application d'un PMS 3 jamais approuvé par l'administration.
3. A l'issue de l'information judiciaire ouverte sur ces faits, M. E... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour avoir, par la violation manifestement délibérée d'une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, causé une incapacité totale de travail supérieure à trois mois au préjudice d'un enfant et une incapacité totale de travail inférieure ou égale à trois mois au préjudice de quinze autres enfants. Il a également été poursuivi notamment pour tromperie sur les qualités substantielles de steaks hachés dont la consommation est dangereuse pour la santé de l'homme, pour mise sur le marché de produits d'origine animale dangereux et détention de denrées servant à l'alimentation de l'homme falsifiées, corrompues ou toxiques nuisibles à la santé de l'homme.
4. Les juges du premier degré l'en ont déclaré coupable. [La cour d'appel de Douai l'a condamné, le 26 février 2019, pour blessures involontaires et infractions au code de la consommation et au code rural, à trois ans d'emprisonnement dont un an avec sursis et 50 000 euros d'amende, à une interdiction professionnelle définitive, à une interdiction définitive de gérer une entreprise commerciale, a ordonné une mesure de confiscation et une mesure de publication. Il s'est pourvu devant la Cour de Cassation qui a jugé que:]
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8. Pour confirmer le jugement des chefs des délits de blessures involontaires ayant causé une incapacité totale de travail de plus de trois mois et des incapacités totales de travail de moins de trois mois, l'arrêt de la Cour d'appel de Douai énonce notamment qu'il convient de rechercher si le prévenu a violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, c'est à dire un acte administratif à caractère général et impersonnel, ce qui ne peut être le cas d'un plan de maîtrise sanitaire (PMS) ou d'une autorisation individuelle.
9. A cette fin, les juges relèvent qu'en matière de viandes hachées, le règlement 853/2004 prévoit que les matières premières ne peuvent provenir que d'ateliers de découpe agréés. Ils précisent que l'agrément délivré par la direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations suppose que le professionnel a mis en place des contrôles de conformité des produits qu'il réceptionne et qu'il fabrique en établissant un plan de maîtrise sanitaire (PMS) qui doit obligatoirement prendre en compte le risque lié à la contamination par la bactérie E-Coli et par la bactérie E-Coli 0157H7 et être approuvé par l'administration.
10. Après avoir également rappelé les principales dispositions du règlement 178/2002, ils ajoutent que le PMS est un élément essentiel d'une entreprise alimentaire, en particulier de fabrication de viande hachée surgelée, et que, le 11 mai 2011, le PMS 2 validé par l'administration n'a pas été respecté, aucune analyse des matières premières n'ayant eu lieu et aucune analyse en E-Coli 0157H7 des produits finis n'ayant été pratiquée, alors qu'elle s'imposait à la suite de la découverte, sur une partie de ces produits, d'un taux préoccupant de 770/g d'E-Coli « classique ».
11. La cour d'appel en conclut qu'en mettant sciemment sur le marché un produit alimentaire potentiellement dangereux sans faire réaliser les analyses qui s'imposaient, le prévenu a violé de façon manifestement délibérée les obligations de prudence et de sécurité prévues par le règlement 178/2002.
12. En l'état de ces énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision.
13. En effet, constituent des obligations particulières de prudence ou de sécurité les prescriptions des articles 14, 17 et 19 du règlement 178/2002 aux termes desquels notam-ment, d'une part, lorsqu'une denrée alimentaire dangereuse fait partie d'un lot ou d'un chargement de denrées alimentaires de la même catégorie ou correspondant à la même description, il est présumé que la totalité des denrées alimentaires de ce lot ou chargement sont également dangereuses, sauf si une évaluation détaillée montre qu'il n'y a pas de preuve que le reste du lot ou du chargement soit dangereux, d'autre part, dans une telle situation l'exploitant doit retirer les denrées du marché, enfin, les exploitants du secteur alimentaire veillent, à toutes les étapes de la production, de la transformation et de la distribution dans les entreprises placées sous leur contrôle, à ce que les denrées alimentaires ou les aliments pour animaux répondent aux prescriptions de la législation alimentaire applicables à leurs activités et vérifient le respect de ces prescriptions.
03/01/2020
Une association demande l'annulation de la circulaire du ministre de l'intérieur et du ministre de l'agriculture et de l'alimentation du 28 mai 2019, y compris ses annexes, relative à la célébration de la fête religieuse musulmane de l'Aïd-el-kébir d'août 2019, qui a pour objet d'organiser l'action de l'autorité préfectorale pour permettre le déroulement des abattages rituels à cette occasion au sein d'abattoirs agréés, en tant qu'elle autorise les abattoirs temporaires. Elle conteste notamment la compétence du ministre de l'agriculture pour déroger aux règles de l'Union européenne.
Les juges considèrent qu'il résulte des articles R231-13 et R214-81 du CRPM que le ministre chargé de l'agriculture est compétent pour définir les normes sanitaires applicables aux abattoirs ainsi que les modalités d'application des règles de l'Union en cette matière, y compris en ce qu'elles prévoient des dérogations. C'est en vertu de cette compétence qu'il a pu légalement prendre la circulaire attaquée, pour préciser les règles en matière d'abattage, dans le cadre des dispositions de l'article R214-70 du CRPM, à l'occasion de la célébration de la fête religieuse musulmane de l'Aïd-el-kébir en 2019, ainsi d'ailleurs que l'arrêté du 18 décembre 2009 relatif aux règles sanitaires applicables aux produits d'origine animale et aux denrées alimentaires, qui prévoit notamment la possibilité d'agréer des abattoirs temporaires.
19/12/2019
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Gosschalk exploite aux Pays-bas un abattoir transformant et commercialisant de la viande de porc. À ce titre, elle a fait l’objet de contrôles officiels destinés à s’assurer qu’elle respectait le règlement 882/2004. Ces contrôles sont notamment réalisés lors d’inspections ante mortem et post mortem, d’une part, par des vétérinaires et des auxiliaires officiels travaillant à la NVWA, qui est l’autorité compétente désignée, au sens de l’article 2, point 4, du règlement 882/2004, et, d’autre part, par des auxiliaires officiels intérimaires de la Kwaliteitskeuring Dierlijke Sector (KDS), qui, d’après le gouvernement néerlandais, est une société privée sans but lucratif. Pour couvrir les frais engendrés par ces travaux d’inspection, le Ministère perçoit, de la part des abattoirs, des redevances, au titre de l’article 27, paragraphe 1, et paragraphe 4, sous a), et de l’annexe VI, points 1 et 2, du règlement 882/2004.
En pratique, l’abattoir introduit auprès de la NVWA une demande spécifiant les travaux d’inspection à accomplir, le nombre de vétérinaires officiels et d’auxiliaires officiels requis, ainsi que le temps nécessaire, exprimé en quarts d’heure, pour réaliser ces travaux. Une fois les travaux d’inspection effectués, le Ministre facture à l’abattoir les montants dus à ce titre. Pour chaque vétérinaire officiel et auxiliaire officiel ayant réalisé des travaux d’inspection, l’abattoir doit ainsi payer un forfait de base et un montant pour chaque quart d’heure consacré auxdits travaux. Lorsque la durée des travaux d’inspection est plus longue que prévu, l’abattoir doit s’acquitter d’un montant supplémentaire par quart d’heure excédentaire. En revanche, si les travaux d’inspection s’achèvent plus tôt que prévu, l’abattoir demeure tenu de payer les quarts d’heure demandés mais non exécutés.
Gosschalk a été destinataire de diverses factures mettant à sa charge des redevances destinées à couvrir des travaux d’inspection réalisés dans ses locaux par la NVWA et la KDS entre l’année 2013 et l’année 2016. Gosschalk a formé des réclamations auprès du Ministre et, après le rejet de ces dernières, a saisi le College van Beroep voor het bedrijfsleven (cour d’appel du contentieux administratif en matière économique, Pays-Bas) qui a saisi la Cour de justice à titre préjudiciel. A cette occasion, la Cour européenne de justice a jugé que l’article 27 du règlement 882/2004 relatif aux contrôles officiels lu en combinaison avec l’annexe VI de ce règlement, doit être interprété en ce sens que 1 - les États membres peuvent considérer comme relevant des coûts occasionnés par les contrôles officiels et comme n’excédant pas les coûts supportés par les autorités compétentes les salaires et les frais du personnel administratif et d’appui, à proportion du temps que des activités indissociablement liées à l’exécution des contrôles officiels requièrent objectivement de ce personnel. 2 - il ne s’oppose pas à la facturation de redevances à des abattoirs pour des quarts d’heure de contrôles officiels que ces abattoirs ont demandés à l’autorité compétente mais qui n’ont pas été effectivement exécutés, lorsque l’abattoir soumis audit contrôle n’a pas informé suffisamment à l’avance cette autorité de sa volonté de raccourcir la durée du contrôle par rapport à la durée initialement prévue, si la fraction de la redevance correspondant à ces quarts d’heure demandés mais non exécutés est affectée à la couverture des frais généraux de l’autorité compétente. 3 - il ne s’oppose pas à ce qu’un barème moyen soit appliqué aux abattoirs non seulement lorsque les contrôles officiels sont réalisés par des vétérinaires engagés par l’autorité compétente mais aussi lorsqu’ils sont effectués par des vétérinaires intérimaires, dont la rémunération est moins élevée, sous réserve que les redevances perçues aux fins des contrôles officiels, prises dans leur ensemble, n’excèdent pas, d’une manière générale, les coûts supportés par les autorités compétentes. 4 - il s’oppose à ce que le calcul des redevances aux fins de contrôles officiels prenne en compte des frais de constitution d’une provision pour une société privée à laquelle l’autorité compétente recourt pour recruter des auxiliaires officiels dans l’hypothèse où une crise sanitaire surviendrait. |
25/11/2019
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1 - Par une instruction technique DGAL/SDSSA/2019-365 du 2 mai 2019, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation a modifié l'instruction DGAL/SDSSA/N2011-8117 du 23 mai 2011 portant application de l'arrêté du 21 décembre 2009 relatif aux règles sanitaires applicable aux activités de commerce de détail, d'entreposage et de transport de produits d'origine animale et denrées alimentaires en contenant, en vue d'adresser un message de prévention sur la consommation de fromages au lait cru par les enfants de moins de cinq ans. Par cette modification, l'instruction technique prévoit un renforcement de l'information sur la prévention, notamment à destination des établissements de restauration collective concernant les fournitures de lait cru et leur service, selon laquelle le lait cru peut présenter un sur-risque d'infection bactérienne chez l'enfant et surtout auprès des enfants de moins de cinq ans. La Fédération syndicale " Confédération paysanne " a demandé au ministre de l'agriculture et de l'alimentation d'abroger cette instruction dès lors que cette dernière, selon la requérante, aboutit à interdire à la restauration collective de servir des fromages au lait cru à des enfants de moins de cinq ans. Par une décision du 22 août 2019, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation a rejeté sa demande d'abrogation. Par une requête, enregistrée le 15 novembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération syndicale " Confédération paysanne " demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension de l'exécution de l'instruction technique DGAL/SDSSA/2019-365 du 2 mai 2019 du ministre de l'agriculture et de l'alimentation, ensemble la décision de refus du ministre de l'agriculture et de l'alimentation de faire droit à l'abrogation de l'instruction technique susvisée du 22 août 2019.
2 - Pour justifier l'urgence à suspendre l'exécution de l'instruction technique du 2 mai 2019 du ministre de l'agriculture et de l'alimentation, la Fédération syndicale " Confédération paysanne " invoque les répercussions négatives de cette instruction sur la perte de marché des producteurs de fromages au lait cru ou de lait cru transformé en fromages par des fromageries. Toutefois, les moyens invoqués à l'appui de la demande de suspension ne suffisent pas à démontrer l'existence d'un préjudice suffisamment grave et immédiat pour la requérante, et ne sont donc pas de nature à caractériser une situation d'urgence au sens de l'article L. 521-1 du code de justice administrative.
3 - Il résulte de ce qui précède que la condition d'urgence requise par l'article L. 521-1 du code de justice administrative ne peut être regardée comme remplie. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'existence d'un doute sérieux quant à la légalité de l'instruction contestée, la requête doit être rejetée.
12/09/2019
Dans le cadre des contrôles effectués par l'autorité néerlandaise de contrôle des denrées alimentaires et des produits de consommation auprès de plusieurs abattoirs de volailles, une contamination par les matières fécales, par le contenu du jabot et par la bile de carcasses de volailles aurait été constatée à la fin de la chaîne du prêt-à-cuire, juste avant la réfrigération. Cette Autorité a établi des rapports de constat dont il ressort que la contamination résultait de mesures insuffisantes pour prévenir la contamination et que ces abattoirs avaient commis une infraction à l’article 3, paragraphe 1, du règlement 853/2004 et à l’annexe III, section II, chapitre IV, points 5 et 8, de ce règlement.
Les abattoirs en cause ont formé un recours en faisant valoir qu’il ne peut être déduit ni du texte ni du contexte des dispositions de l’annexe III, section II, chapitre IV, points 5 et 8, du règlement 853/2004 qu’elles imposent une norme de « tolérance zéro » afin d’éviter toute contamination. Ils soutiennent que les carcasses doivent pouvoir être nettoyées encore au stade de la réfrigération ou à un stade ultérieur au moment de la découpe et de l’emballage. Ils contestent également le fait que les matières fécales, le contenu du jabot et la bile puissent être à l’origine d’une contamination. En outre, ils remettent en question les modalités de contrôle en soulignant que, lors des contrôles, les carcasses ne peuvent être retirées de la chaîne et que seules les surfaces externes peuvent être examinées visuellement.
Le tribunal de Rotterdam, éprouvant des doutes quant à l’interprétation qu’il convient de donner des textes du droit de l’Union applicables, a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) Convient-il d’interpréter les dispositions de l’annexe III, section II, chapitre IV, points 5 et 8, du règlement 853/2004 en ce sens qu’une carcasse de volailles ne peut plus présenter aucune contamination visible après l’éviscération et le nettoyage ?
2) Les dispositions de l’annexe III, section II, chapitre IV, points 5 et 8, du règlement 853/2004 concernent-elles à la fois la contamination fécale, la contamination par le contenu du jabot et la contamination par la bile ?
3) Si la première question reçoit une réponse affirmative, le prescrit de l’annexe III, section II, chapitre IV, point 8, du règlement 853/2004 doit-il être interprété en ce sens que le nettoyage doit intervenir directement après l’éviscération, ou cette disposition autorise-t-elle encore l’élimination de la contamination visible pendant la réfrigération, le découpage ou l’emballage ? »
Sur la notion de contamination
La notion de « contamination » englobe-t-elle non seulement la contamination par la matière fécale, mais également la contamination par le contenu du jabot et par la bile?
Le point 5 de l’annexe III, section II, chapitre IV, du règlement 853/2004 ne précise pas quelles pourraient être les sources de contamination des carcasses lors de l’abattage. En effet, il se limite à indiquer que « l’étourdissement, la saignée, le dépouillement ou la plumaison, l’éviscération et autre habillage doivent être effectués sans retard indu de façon à éviter toute contamination des viandes. Il faut notamment prendre des mesures pour éviter le déversement du contenu du tractus digestif pendant l’éviscération ».
La matière fécale, le contenu du jabot et la bile font-ils partie du « tractus digestif », et à ce titre, peuvent-ils être considérés comme des sources de contamination au sens de ce règlement?
L’économie générale du règlement 853/2004 ainsi que l’objectif d’un niveau élevé de protection des consommateurs qu’il vise à atteindre commandent de retenir toutes les sources de contamination. Ainsi, la notion de « tractus digestif » ne peut pas être restreinte aux intestins et à leur contenu. En effet, le tractus digestif comprend l’ensemble des organes qui constituent l’appareil digestif, mais aussi le contenu de ces organes, de la bouche à l’anus. Les matières fécales, le contenu du jabot et la bile font donc partie du tractus digestif et doivent donc être considérés comme relevant des obligations prévues à l’annexe III, section II, chapitre IV, points 5 et 8, du règlement 853/2004.
Donc la notion de « contamination » englobe non seulement la contamination par la matière fécale, mais également la contamination par le contenu du jabot et par la bile.
Sur la nature visible ou non des contaminations
Il convient de relever que ni la définition de la notion de « contamination » à l’article 2, paragraphe 1, sous f), du règlement no 852/2004 ni l’annexe III, section II, chapitre IV, points 5 et 8, du règlement no 853/2004 ne distinguent la contamination visible de la contamination invisible.
Toutefois, il ressort des points 39 à 41 du présent arrêt que la notion de « contamination », au sens de l’annexe III, section II, chapitre IV, points 5 et 8, du règlement 853/2004 est définie de manière large. Elle ne peut, dès lors, se limiter à la seule notion de contamination visible.
À cet égard, il convient de noter que le législateur de l’Union a pris le soin de faire une distinction entre les différentes espèces d’animaux, notamment en distinguant les viandes d’ongulés domestiques des viandes de volailles et de lagomorphes. Or, à l’annexe III, section I, chapitre IV, de ce règlement, consacré à l’hygiène de l’abattage concernant les viandes d’ongulés domestiques, il a expressément indiqué, au point 10, que les carcasses relevant de cette catégorie « doivent être exemptes de toute contamination fécale visible » et que « toute contamination visible doit être éliminée sans tarder par le parage ou par tout autre procédé ayant un effet équivalent ».
Force est de constater qu’une telle précision n’apparaît pas sous le chapitre consacré à l’hygiène de l’abattage des viandes de volailles et de lagomorphes. Ainsi, le législateur de l’Union a souhaité conserver une définition large de la notion de contamination à l’annexe III, section II, chapitre IV, points 5 et 8, du règlement 853/2004, englobant tant la contamination visible que la contamination invisible.
Par conséquent, conformément à l’annexe III, section II, chapitre IV, points 5 et 8, du règlement 853/2004, la notion de « contamination » vise tant la contamination visible que la contamination invisible.
Sur la présence de contaminations après le nettoyage
S’agissant de la question de savoir à quel stade est requise l’absence de toute contamination, qu’elle soit visible ou non, il convient de relever que les requérants font valoir qu’il est impossible de satisfaire à une norme de tolérance zéro et que les éventuelles contaminations présentes sur la carcasse au stade de la chaîne du prêt‑à‑cuire sont éliminées durant le processus de réfrigération ou lors de la découpe ainsi que de l’emballage. Les abattoirs auraient alors une simple obligation de moyens concernant l’absence de contamination tout au long du processus d’abattage.
Il ressort du libellé de l’annexe III, section II, chapitre IV, point 5, du règlement 853/2004 que, au stade de l’abattage, toute mesure doit être prise afin d’éviter une contamination, notamment par le déversement du tractus digestif pendant l’éviscération. L’emploi du verbe « éviter » démontre que le législateur de l’Union n’a pas souhaité imposer d’obligation de résultat à ce stade du processus, mais a, en revanche, incité les abattoirs à mettre en œuvre toutes les mesures possibles afin de faire en sorte de ne pas contaminer les carcasses. En effet, l’absence de toute contamination visible à ce stade ferait peser une obligation déraisonnable sur les abattoirs.
L’inspection post mortem vise précisément à faire le tri entre les parties impropres à la consommation humaine et les autres parties pouvant passer au stade du nettoyage, afin d’être débarrassées de toutes les souillures résiduelles, telles que le sang ou le contenu des boyaux. Ce stade apparaîtrait alors totalement superflu si un seuil de tolérance zéro était appliqué dès après le stade de l’éviscération, ne tolérant aucune contamination visible.
En revanche, il ressort de l’ordre des étapes de transformation retenu par le législateur de l’Union à l’annexe III, section II, chapitre IV, point 8, du règlement 853/2004 que le nettoyage doit intervenir avant la réfrigération et donc avant la découpe, l’emballage et la mise à disposition au consommateur. Après le stade du nettoyage, aucune contamination visible ne saurait dès lors subsister.
Ainsi, au stade du nettoyage, la surveillance opérée par le vétérinaire officiel a déjà permis de mettre en œuvre les mesures nécessaires afin de ramener le danger à un niveau acceptable, en nettoyant les parties pouvant encore l’être, et, à défaut de pouvoir ramener le danger à un niveau acceptable, d’adopter les mesures correctives adéquates afin d’éliminer ce danger, à savoir déclarer les parties concernées impropres à la consommation humaine, et ce conformément aux « principes HACCP », au sens de l’article 5 du règlement 852/2004.
Par ailleurs, le fait de maîtriser l’étape du nettoyage en présentant une carcasse exempte de toute contamination visible lors du stade de la réfrigération, de celui de la découpe et de celui de l’emballage est d’autant plus primordial que ces stades constituent déjà à eux seuls un point critique en raison des nombreux contacts de la viande avec les surfaces ou les matériels souillés. Si le danger de l’étape précédente n’est pas maîtrisé, il risque de se répercuter ou même de s’amplifier lors de l’étape suivante. L’objectif visant à atteindre un niveau élevé de protection des consommateurs en serait, dès lors, gravement compromis.
Ainsi, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le stade de la réfrigération n’a pas vocation à nettoyer les carcasses afin d’éliminer toute contamination visible, mais vise, notamment, à freiner la multiplication des germes et à conserver la viande afin de poursuivre l’étape de la découpe et de l’emballage dans les meilleures conditions.
Par conséquent, l’annexe III, section II, chapitre IV, points 5 et 8, du règlement no 853/2004 doit être interprétée en ce sens qu’une carcasse de volailles ne doit plus présenter de contamination visible après le stade du nettoyage et avant le stade de la réfrigération.
Par ces motifs, la Cour dit pour droit :
1) L’annexe III, section II, chapitre IV, points 5 et 8, du règlement 853/2004 doit être interprétée en ce sens que la notion de « contamination » englobe non seulement la contamination par la matière fécale, mais également la contamination par le contenu du jabot et par la bile.
2) L’annexe III, section II, chapitre IV, points 5 et 8, du règlement 853/2004 doit être interprétée en ce sens qu’une carcasse de volailles ne doit plus présenter de contamination visible après le stade du nettoyage et avant le stade de la réfrigération.
12/06/2019
1 - La Cour d'appel de Bordeaux a condamné le 14 mars 2018 M. F... pour infraction à la réglementation sur l'hygiène et la sécurité alimentaires à un an d'emprisonnement avec sursis, 10 000 euros d'amende, trois ans d'interdiction de gérer une entreprise commerciale et cent-dix-neuf amendes de 50 euros chacune.
2 - Courant 2015 et 2016 les techniciens vétérinaires de la direction départementale de la protection des populations (DDPP) de la Gironde ont établi des procès-verbaux concernant, d'une part, les activités de découpe de viande de porc, de distribution et de commercialisation de produits de la charcuterie de la société « Charcuterie bordelaise » et, d'autre part, le commerce de boucherie charcuterie de la société "Atelier du boucher, garonnaise de viandes", sociétés dirigées par M. F..., gérant de la première et président de la seconde ; que ces procès-verbaux ont fait état de la présence de la bactérie Listeria monocytogenes, pathogène pour l'homme, provoquant la listériose; qu'en outre, lors d'un contrôle effectué le 16 décembre 2015 dans les locaux de l'« Atelier du boucher, garonnaise de viandes », dont l'unique fournisseur est la « Charcuterie bordelaise », les services de la DDPP ont constaté la présence de produits de charcuterie destinés à l'alimentation humaine manifestement corrompus et de produits dont les dates limites de consommation étaient dépassées. M. F... a été poursuivi pour s'être abstenu de mettre en œuvre les procédures de retrait ou de rappel d'un produit d'origine animale ou de denrées en contenant, préjudiciable à la santé, pour détention de produit alimentaire falsifié ou corrompu et nuisible à la santé, exposition ou vente de denrées alimentaires falsifiées, corrompues ou toxiques et pour détention pour vente, vente ou offre de denrées alimentaires après la date limite de consommation.
3 - La Cour de cassation observe que, pour déclarer M. F... coupable de non-retrait ou rappel de produits d'originale animale ou de denrées en contenant préjudiciables à la santé, l'arrêt de la Cour d'appel constate que les contrôles effectués par les services de la DDPP et des auto-contrôles de la « Charcuterie bordelaise » ayant donné lieu à sept rapports d'analyse, établis entre le 3 octobre 2014 et le 12 mars 2015, font état de la présence de Listeria monocytogenes ; que les produits ainsi contaminés n'avaient pas été retirés et que les taux déclarés par la suite avaient augmenté ; que lors d'un nouveau contrôle, les 16 et 17 décembre 2015, il a été relevé que des lots de produits contaminés avaient été commercialisés depuis leur date de conditionnement, alors que M. F... avaient certifié les avoir détruits, et que la DDPP n'avait pas été destinataire des déclarations de non-conformités de ces lot de produits, ni informée d'une procédure de retrait/ rappel concernant ces lots ; que malgré injonction un contrôle du 8 janvier 2016 à la « Charcuterie bordelaise » a mis en évidence que des lots déclarés non conformes n'avaient pas été retirés du circuit de commercialisation ; que les juges énoncent encore qu'au cours de ses différentes auditions, tant devant les enquêteurs que devant le tribunal et la cour, M. F... a reconnu la matérialité des faits mais a nié toute volonté frauduleuse, prétendant ignorer la réglementation relative au seuil de détection de la listeria et réfutant les témoignages de ses anciennes employées ; qu'interrogé sur la contamination des produits, il a expliqué qu'il pensait que les produits contenant à faible dose de Listeria étaient propres à la consommation et ne mettaient pas en danger la vie des consommateurs ; que s'il a reconnu quelques négligences, il a contesté avoir eu connaissance, directement et personnellement, des résultats du laboratoire et a considéré que seule sa responsable qualité avait tout pouvoir pour faire un retrait ou un rappel des produits.
4 - Pour la Cour de cassation, en l'état de ces énonciations, d'où il se déduit que la présence de Listeria monocytogenes dans des denrées alimentaires prêtes à être consommées était caractérisée, sans que M. F... ait démontré, ni même allégué que ces produits respecteraient la limite de 100 Ufc/g pendant la durée de leur conservation, la cour d'appel a justifié sa décision.
En effet, s'agissant des critères de sécurité applicables aux denrées alimentaires prêtes à être consommées permettant le développement de Listeria monocytogenes, autres que celles destinées aux nourrissons ou à des fins médicales spéciales, il résulte du règlement 2073/2005 du 15 novembre 2005 concernant les critères microbiologiques de sécurité applicable aux denrées alimentaires (annexe I, chapitre 1, point n° 1.2 du tableau de référence) qu'il appartient au fabricant ou à l'opérateur de démontrer, à la satisfaction de l'autorité compétente, que le produit respectera la limite de 100 Ufc/g pendant la durée de conservation.
5 -La Cour de cassation, s'appuyant sur la note 5 du tableau du chapitre I de l'annexe I du règlement 2073/2005, rappelle que l'étude de la durée de vie microbiologique en ce qui concerne Listeria monocytogenes dans les denrées alimentaires prêtes à être consommées, doit être réalisée "à la satisfaction de l'autorité compétente". Il appartient donc à l'opérateur de réclamer la validation expresse de son étude démontrant le respect de la norme des 100ufc/g.
6 - Ainsi, la mise sur le marché d'une denrée alimentaire prête à être consommée contenant Listeria monocytogenes associée au non respect de cette obligation de d'étude de durée de vie microbiologique, réalisée "à la satisfaction de l'autorité compétente", constitue l'élément matériel de l'infraction de non-retrait ou rappel de produits d'originale animale ou de denrées en contenant préjudiciables à la santé que l'article L237-2 du CRPM punit de cinq ans d'emprisonnement et d'une amende de 600 000€.
02/05/2019
1 - Dans le cadre d’un litige opposant un exploitant d'abattoir établi aux Pays-Bas aux autorités de ce pays au sujet d’amendes administratives infligées pour avoir transbordé dans un véhicule frigorifique de la viande à une température dépassant 7° C, la juridiction de renvoi demande à la Cour de justice de l'Union européenne si l’annexe III, section I, chapitre VII, points 1 et 3, du règlement 853/2004 doit être interprétée en ce sens que la réfrigération de la viande après l’abattage doit être effectuée uniquement dans les locaux de l’abattoir jusqu’à ce que celle-ci atteigne, dans toutes ses parties, une température ne dépassant pas 7° C ou si elle peut être également effectuée dans un véhicule frigorifique situé sur le site de cet abattoir.
2 - Conformément aux points 1 et 3 du chapitre VII, section I, de l’annexe III du règlement no 853/2004, l’inspection post mortem des animaux doit être suivie immédiatement d’une réfrigération dans l’abattoir afin d’assurer, dans toutes les parties de la viande, une température ne dépassant pas 7° C. De plus, les viandes doivent atteindre et conserver cette température tant avant que pendant leur transport.
Il ressort du libellé de ces dispositions que la réfrigération doit être effectuée dans l’abattoir même. Il convient, dès lors, d’apprécier si un véhicule frigorifique peut être considéré comme constituant une partie d’un « abattoir », au sens du règlement 853/2004, consacrée à la réfrigération de la viande.
3 - Pour répondre à cette question, la Cour développe quatre arguments: l’inadaptation technique d'un véhicule frigorifique, la difficulté du contrôle de température, l'absence d'agrément et le non respect de l'objectif de sécurité alimentaire.
a - Un véhicule frigorifique est, par sa nature même, destiné au transport de la viande et n’intervient pas dans le processus d’abattage, d’habillage ainsi que de refroidissement de la viande avant l’entreposage ou le transport. La fonction de tels véhicules consiste principalement à transporter la viande et non à la réfrigérer, leurs installations de réfrigération étant conçues pour maintenir une température basse pendant le transport.
b - Une réfrigération dans la chambre froide des abattoirs permet une application immédiate du froid dans des conditions optimales, aux fins de prévenir le développement de bactéries et, par conséquent, de garantir un haut niveau de sécurité alimentaire, contrairement à celle qui peut être réalisée dans un véhicule frigorifique, au cours de laquelle la température n’est contrôlée que de manière empirique.
c - Les exploitants du secteur alimentaire ne mettent sur le marché les produits d’origine animale produits dans l’Union que s’ils ont été préparés et manipulés exclusivement dans les établissements qui ont été, dans le cas présent, agréés par l’autorité compétente. L’obtention de cet agrément par les exploitants du secteur alimentaire est subordonnée à certaines exigences relatives aux locaux de l’établissement où sont exercées des activités d’abattage et d’habillage.
Or, les moyens de transport des viandes, bien qu’ils soient soumis à un certain nombre d’exigences, telles que celles prévues au chapitre IV de l’annexe II, intitulé « Transport », du règlement 852/2004, sont exemptés d’une telle procédure d’agrément par l’autorité compétente et ne sont pas couverts par l’agrément de l’exploitant de l’abattoir.
d - L’objectif consistant à assurer un niveau élevé de protection de la santé publique a conduit le législateur de l’Union à faire peser sur les exploitants du secteur alimentaire la responsabilité de garantir la sécurité des aliments, ainsi qu’à imposer l’obligation d’effectuer tout abattage d’animaux dans les abattoirs qui respectent les exigences techniques relatives à la construction, à la configuration et à l’équipement figurant, en particulier, à l’annexe III du règlement no 853/2004.
5 - Au vu de l’ensemble de ces considérations la Cour juge que la réfrigération de la viande après l’abattage doit être effectuée dans les locaux mêmes de l’abattoir jusqu’à ce que celle-ci atteigne, dans toutes ses parties, une température ne dépassant pas 7°C, avant tout transbordement de cette viande dans un véhicule frigorifique.
20/11/2018
1 - L'union nationale pour la pharmacie vétérinaire d'officine (UNPVO) a demandé à la Cour administrative d’appel de Paris de condamner l’État pour ses pratiques en matière de contrôle des pharmacies vétérinaires aux motifs que
- le contrôle et la copie de documents, réalisés sur le fondement du code de la consommation, et non sur celui du code de la santé publique, qui offre davantage de garantie, sont irréguliers ;
- le nombre des contrôles visant les pharmacies vétérinaires est disproportionné au regard de ceux visant les médecins et les cliniques vétérinaires et que cette disproportion porte atteinte au principe d'égalité devant la loi.
2. Le 20 novembre 2018, la Cour administrative d’appel (CAA) de Paris (17PA01536) a considéré que les "vétérinaires officiels" et les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes peuvent légalement effectuer, le cas échéant conjointement, des enquêtes ayant pour objet de rechercher et constater les infractions aux dispositions relatives à la délivrance de médicaments vétérinaires ; que, pour ce faire, les " vétérinaires officiels " peuvent réaliser les mesures d'enquête prévues par les articles du code de la santé publique tandis que les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes disposent des pouvoirs prévus au livre II du code de la consommation.
3 - Il ressort des procès-verbaux de déclaration et de saisie de documents que les contrôles ont été réalisés dans le cadre d'une inspection conjointe d’un inspecteur-expert de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, et d’un inspecteur en chef de santé publique vétérinaire ; que ces deux inspecteurs tenaient des articles L. 5146-1 et L. 5146-2 du code de la santé publique leur compétence pour assurer les contrôles et rechercher les infractions ; que la seule circonstance que les procès-verbaux ont été pris au visa du seul article 215-3 du code de la consommation et que les articles L. 1421-1 et suivants du code de la santé publique n'aient pas été également visés est sans influence sur la compétence de ces inspecteurs pour mener les contrôles et constater d'éventuelles infractions.
4 - L’inspecteur-expert de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, signataire des procès-verbaux en litige, pouvait, en application de l'article L. 215-3 du livre II du code de la consommation alors applicable (devenu depuis les articles L512-5 et suivants du code de la consommation), accéder aux locaux de pharmacie et exiger la communication, obtenir copie ou procéder à la saisie des documents de toute nature, propres à faciliter l'accomplissement de sa mission et la mise à leur disposition des moyens indispensables pour effectuer ses vérifications ; que la circonstance que le procès-verbal d'inspection conjointe ait également été signé par l’inspecteur en chef de santé publique vétérinaire, dont les pouvoirs sont régis par le code de la santé publique, n'a pas eu pour effet d'entacher d'irrégularité les contrôles réalisés dans ces pharmacies et les mesures de prise de copie ou de saisie de documents réalisés dans ce cadre.
5 - Sur l’équité des contrôles, la Cour a considéré que les mêmes règles s'appliquent au contrôle des pharmacies d'officine et aux vétérinaires praticiens qui sont soumis aux mêmes obligations ; que les allégations de l'UNPVO qui soutient que les contrôles dans les pharmacies se déroulent dans une ambiance qu'elle qualifie de délétère tandis que les inspections des cabinets et cliniques vétérinaires se dérouleraient, selon ses dires, dans une ambiance détenue et agréable, dans des conditions beaucoup plus respectueuses et confraternelles, qui se fondent sur un nombre très limité de témoignages individuels, ne permettent pas de tenir pour établie l'existence d'une différence de traitement entre les deux professions.
6 - Lorsqu'elle établit un programme de contrôle des pharmacies délivrant des médicaments pour les animaux et des vétérinaires, l'administration, qui dispose d'un large pouvoir d'appréciation, peut tenir compte d'éléments multiples et notamment du nombre d'établissements délivrant des médicaments vétérinaires, des quantités délivrées par chacun d'entre eux, des risques d'infractions qui se seraient révélés à l'expérience, des antécédents particuliers des établissements inspectés, ainsi que de tout autre motif légitime ; que cependant, la différence entre le nombre de contrôles réalisés dans les pharmacies d'officine et les vétérinaires ne doit pas être manifestement disproportionnée, ni présenter le caractère d'une discrimination indirecte.
7 - L'UNPVO fait valoir que les pharmacies qui distribuent approximativement 10% des médicaments vétérinaires représentent jusqu'à 70% des établissements contrôlés, tandis que les vétérinaires, qui en distribuent approximativement 60% ne représentent que 30% des contrôles ; qu'elle y voit une atteinte au principe d'égalité et une discrimination indirecte ; que cependant, s'il ressort des rapports annuels du plan national de contrôles officiels pluriannuels qu'en 2015, 334 contrôles ont visé les pharmacies et 119 contrôles ont visé les vétérinaires, l'écart était moins significatif en 2016, année au cours de laquelle 132 pharmacies et 143 vétérinaires ont été contrôlés, et en 2014, année au cours de laquelle 117 pharmaciens et 94 vétérinaires ont été inspectés ; que, par ailleurs, le risque de délivrance irrégulière de médicaments vétérinaires que les inspections ont pour mission d'identifier est davantage lié au nombre d'établissements susceptibles de délivrer de tels produits qu'aux quantités effectivement délivrées ; qu'en l'espèce, si la quasi-totalité des quelque 6 700 vétérinaires disposent de ces produits, il ressort du rapport de l'inspection générale des affaires sociales de 2016 qu'au moins 55% des quelque 22 000 pharmacies, soit environ 12 000 officines, vendent également des médicaments vétérinaires ; que la circonstance que les quantités vendues soient généralement faibles ne justifie pas que les pharmacies doivent échapper à un contrôle régulier ; que s'il est en effet vraisemblable que les contrôles pèsent plus lourdement sur un nombre réduit de pharmacies rurales que sur d'autres officines, cette différence de traitement n'est pas sans rapport avec l'objet des contrôles ; qu'il ne ressort pas des éléments statistiques produits et des arguments échangés par les parties que la proportion de pharmacies contrôlées serait anormalement élevée et les inspections anormalement fréquentes au regard des possibilités de délivrance irrégulière des médications en cause, tandis que les établissements vétérinaires bénéficieraient de contrôles moins fréquents ; que les inspections ne présentent pas dès lors de caractère discriminatoire.
8 - Cet arrêt peut paraître curieux : la CAA de Paris se prononce sur la validité de la procédure de recherche d’infractions et de procès-verbaux de constatation d’infractions sans se justifier de ce qui paraît être une atteinte manifeste au principe de séparation des pouvoirs, ces sujets étant généralement considéré de la compétence exclusive des tribunaux de l’ordre judiciaire. De plus la cohérence avec la position récente de la Cour de cassation à propos d’un procès-verbal rédigé dans les mêmes circonstances n’apparaît pas de façon évidente.
06/11/2018
1 - A la suite de vérifications opérées en décembre 2011 dans une pharmacie, dans le cadre d'une enquête nationale sur les conditions de délivrance de certains médicaments vétérinaires détournés de leur usage notamment à des fins de dopage, un inspecteur en chef de santé publique vétérinaire et deux agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), ont procédé à la saisie de l'ordonnancier de cette officine et ont constaté que la moitié des délivrances de médicaments vétérinaires durant les années 2010 et 2011 résultait de prescriptions d’un vétérinaire éloigné géographiquement de la pharmacie concernée ; que les trois agents ont en conséquence entrepris des vérifications relatives aux conditions de prescription des médicaments et ont établi un procès-verbal d'infraction, pour prescription, par un vétérinaire, de médicaments vétérinaires à des animaux auxquels il ne donne pas personnellement des soins ou dont la surveillance sanitaire et le suivi régulier ne lui sont pas confiés.
2 - Le tribunal saisi a fait droit à l'exception de nullité soulevée par les prévenus, a annulé la procédure et a relaxé les prévenus au motif de l'absence d'information préalable du procureur de la République par l’inspecteur de la santé publique vétérinaire qui, agissant au titre de l'article L. 5146-2, 3°, du code de la santé publique, devait faire application de l'article L. 5411-2 du même code qui prescrit cette formalité.
3 – La cour de Cassation (17-81703) a confirmé cette décision en énonçant « que le non-respect, par un enquêteur, de l'obligation d'informer préalablement le procureur de la République des opérations envisagées affecte nécessairement la validité de tous les actes effectués conjointement avec d'autres enquêteurs, même non soumis à cette contrainte ».
4 – Ainsi, le fait que le procès-verbal ait été signé non seulement par l’inspecteur de la santé publique vétérinaire, mais aussi par deux agents de la répression des fraudes, qui agissant au titre du code de la consommation, n’étaient pas soumis à l’obligation d’information préalable du procureur de la République, est sans incidence sur la nullité : une enquête effectuée conjointement par deux services ne donne pas aux enquêteurs d'un service des pouvoirs qui ne leur sont pas dévolus par la loi, chaque service devant agir selon ses propres prérogatives.
5 - La signature conjointe par plusieurs agents d’un même procès-verbal, quand elle n’est pas rendue absolument nécessaire par les constatations qui y sont rapportées, doit être écartée : elle est source de ralentissement des procédures d’établissement du procès-verbal et engendre des difficultés procédurales pouvant annuler l’ensemble de la procédure.
6 – Le formalisme imposé par l’article L. 5411-2 du code de la santé publique est le même que celui des articles L205-3 et L205-5 du code rural et de la pêche maritime qui gouvernent la procédure de police judiciaire pour les infractions au livre II du code rural et de la pêche maritime. L’information préalable du procureur de la République, quand l’infraction constatée n’est pas découverte fortuitement à l’occasion d’une intervention de police administrative, mais délibérément recherchée, est une obligation dont le non respect entraîne la nullité de la procédure appuyée sur le procès-verbal établi dans ces circonstances.
05/11/2018
1 - En janvier 2006, les services vétérinaires allemands ont découvert, lors du contrôle d'un atelier de découpe de viandes de gibier, une situation sanitaire très dégradée. Des prélèvements ont été réalisés. Les échantillons dégageaient une odeur rance, méphitique, moisie ou acide. Le processus de putréfaction était déjà entamé pour six échantillons sur les neuf examinés. Le ministère en a conclu que les denrées en cause étaient impropres à la consommation humaine et donc dangereuses au sens de l'article 14 du règlement 178/2002. Face à l'opposition de l'entreprise, il a informé lui-même les consommateurs de la situation.
2 - L'entreprise, contrainte au dépôt de bilan, a déposé un recours devant la justice allemande, contestant le pouvoir du ministre de diffuser ces informations confidentielles car issues de contrôles, alors que le risque pour la santé imposé par l'article 10 pour communiquer auprès des consommateurs n'était pas établi.
3 - La Cour de Justice européenne, saisie d'une question préjudicielle, a jugé l'affaire sur trois points.
4 – En premier lieu une denrée dangereuse au sens de l'article 14 peut ne pas présenter de risques pour la santé. Dès lors, ainsi que le soutenait l'entreprise, le critère de la dangerosité, notamment quand celle-ci est liée au caractère désagréable du goût ou de l'odeur, n'est pas suffisant pour mettre en œuvre l'article 10.
5 - Cependant si l’État membre dispose d'une réglementation spécifique permettant cette communication, cette réglementation n'est pas contraire au règlement 178/2002 : l’article 10 du règlement 178/2002 du 28 janvier 2002, établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire (...) n’est pas de nature à faire obstacle à une réglementation nationale qui permet une information des citoyens mentionnant le nom de la denrée alimentaire ainsi que celui de l’entreprise sous le nom de laquelle la denrée a été fabriquée, traitée ou distribuée, dans une situation où une telle denrée, bien que n’étant pas préjudiciable à la santé, est impropre à la consommation humaine.
6 – En troisième lieu, elle a souligné qu'en l'absence d'une réglementation nationale, l'autorité compétente d'un État membre peut communiquer en application de l'article 17 du règlement 178/2002.
En effet, une denrée alimentaire inacceptable pour la consommation humaine est de nature à porter atteinte aux intérêts des consommateurs, dont la protection est l’un des objectifs poursuivis par la législation alimentaire. Il en découle que, lorsque des denrées alimentaires, bien que n’étant pas préjudiciables à la santé humaine, ne répondent pas, parce qu’impropres à la consommation humaine, aux prescriptions relatives à la sécurité des denrées alimentaires, les autorités nationales peuvent, ainsi que l’envisage l’article 17, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement 178/2002, en informer les consommateurs dans le respect des exigences de l’article 7 du règlement 882/2004.
7 – Ainsi, quand, comme en France, il n'existe pas de dispositions nationales prévoyant spécifiquement la communication au public d'informations issues des contrôles de sécurité alimentaire, le règlement 178/2002 offre deux possibilités :
- si il y a un risque pour la santé, par application de l'article 10, l’État membre est tenu de communiquer en apportant tous les détails utiles sur l'identification du produit ;
- si il n'y a pas de risque pour la santé mais une atteinte à la sécurité du consommateur, en application de l'article 17, l’État membre peut communiquer en se limitant aux seules informations pertinentes conformément à l'article 7 du règlement 882/2004.