24/10/2018
Comment la Cour européenne de Justice apprécie-t-elle le respect de l'obligation des États membres de posséder un personnel vétérinaire qualifié et expérimenté en nombre suffisant fixée par l'article 4, paragraphe 2 sous c) du règlement 882/2004 relatif aux contrôles officiels effectués pour s'assurer de la conformité avec la législation sur les aliments pour animaux et les denrées alimentaires et avec les dispositions relatives à la santé animale et au bien-être des animaux ?
1 - Dans un arrêt du 23 avril 2009 (C-331/07) ayant pour objet un recours en manquement d’État introduit par la Commission contre la Grèce pour insuffisance des effectifs affectés aux services préposés aux contrôles vétérinaires en application du règlement 882/2004 relatif aux contrôles officiels effectués pour s'assurer de la conformité avec la législation sur les aliments pour animaux et les denrées alimentaires et avec les dispositions relatives à la santé animale et au bien-être des animaux, la Cour de justice européenne a dû apprécier le respect de l'obligation d'un effectif vétérinaire suffisant.
2 – C'est l’article 4, paragraphe 2, sous c), de ce règlement qui impose aux autorités compétentes de posséder un personnel dûment qualifié et expérimenté en nombre suffisant pour pouvoir exécuter les contrôles officiels et s’acquitter des obligations de contrôle de manière efficace et effective.
3 - La Cour souligne (45) qu'il découle des termes mêmes de cette disposition, que, pour qu’un manquement puisse être constaté, il est suffisant qu’une partie des contrôles ne puisse pas être effectuée de manière efficace et effective en raison du manque de personnel affecté à la réalisation de ceux-ci.
4 – Pour trancher sur le caractère réel du manquement la Cour a considéré que les résultats concrets obtenus par les services en matière de protection de la santé publique ou animale n'étaient pas pertinents. Ainsi elle écrit (46) « la circonstance qu’aucune crise alimentaire n’est survenue au cours de la période concernée et que les autorités compétentes ont pu faire face avec succès aux épizooties est sans pertinence aux fins d’apprécier l’existence dudit manquement. Une telle circonstance ne saurait, en tant que telle, démontrer qu’il a été satisfait à l’obligation de disposer d’un personnel en nombre suffisant pour pouvoir exécuter les contrôles officiels, telle qu’elle résulte de l’article 4, paragraphe 2, sous c), du règlement 882/2004. »
5 – La cour estime en revanche que les rapports de l’Office alimentaire et vétérinaire (OAV) constituent une bonne base d'appréciation car il en ressort notamment que l’OAV a constaté une insuffisance de personnel au sein des services vétérinaires, au niveau tant de l’administration centrale que des directions des administrations départementales, et que, en raison de cette insuffisance, les contrôles prévus par la réglementation communautaire en matière vétérinaire n’avaient pas pu, dans leur ensemble, être réalisés de manière efficace et effective.
6 – Un seul rapport n'aurait cependant sans doute pas suffit à convaincre la Cour qui affirme qu'eu égard au nombre de missions réalisées régulièrement par l’OAV au cours de la période concernée et à la constance des constatations consignées dans les rapports élaborés par cet organisme, il y a lieu de considérer que la Commission a fourni suffisamment d’éléments faisant apparaître que les autorités nationales ont développé une pratique présentant un certain degré de constance et de généralité qui est contraire aux dispositions de l’article 4, paragraphe 2, sous c), du règlement 882/2004.
6 – La République hellénique aurait pu contester les données ainsi présentées et les conséquences qui en découlent mais elle n’a pas présenté d’éléments tendant à réfuter de manière substantielle et détaillée les données reprises des rapports de l’OAV concernant l’insuffisance de personnel au sein des services vétérinaires, données que la Commission a invoquées au soutien de son recours.
7 – Ainsi ceux qui souhaitaient que la Cour s'appuie sur des éléments chiffrés tel un ratio entre le nombre d'agents et la population ou les effectifs animaux, ou procède par comparaison avec les autres États membres, ou encore se fonde sur la bonne affectation des redevances d'inspection vétérinaire seront déçus. L'approche la Cour est pragmatique. Elle se construit sur le jugement des experts de l'OAV, non pas au travers d'un rapport, quoiqu'il soit suffisant de démontrer qu'une partie des contrôles n'est pas réalisée, mais de plusieurs dont les constatations n'ont pas été contestées efficacement par l’État membre.