27/04/2020
Si une mesure de police prend généralement la forme d'un écrit, le tribunal administratif de Cholet a jugé le 28 avril 2020 qu'un arrêté municipal imposant un couvre-feu peut revêtir la simple forme d'une communication orale.
Par ordonnance du 24 avril 2020, le tribunal administratif de Cholet a annulé l'arrêté municipal du 14 avril 2020 du maire de Cholet qui, sur le fondement des articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, a interdit la circulation des personnes sur l’ensemble du territoire de la commune après 21 heures et jusqu’à 5 heures à compter du 16 avril 2020 et jusqu’au 11 mai 2020.
Le jour même de la notification de cette ordonnance, le maire de Cholet a fait savoir à la population de cette commune, par une communication largement reprise par la presse locale et nationale, qu’il a décidé de renouveler l’arrêté suspendu, en réduisant la durée de l’interdiction de circuler qui s’appliquerait désormais de 22 heures à 5 heures.
Le juge a considéré que "s’il est vrai que la communication du maire ne fait état que de sa décision « de prendre un arrêté de 22h à 5h », la formulation de cette communication, son contexte, particulièrement polémique et la façon dont la presse en a rendu compte ne laissait pas la place à la moindre ambiguïté quant à la portée pratique de la nouvelle restriction de circuler faite à la population de la commune et ce, dès le vendredi 24 avril 2020. A supposer que l’intention du maire de la commune de Cholet n’était que d’annoncer un arrêté à venir et non d’annoncer une décision applicable le jour même, il ne ressort pas du dossier qu’il aurait demandé à la presse de rectifier la portée de ses déclarations. Par ailleurs, alors qu’elle a pris connaissance le 27 avril 2020 à 8h39 de la requête par laquelle la Ligue des Droits de l’Homme faisait valoir l’existence d’une décision non formalisée et non publiée qui se déduisait des agissements, et en particulier des propres propos de son maire, la commune de Cholet n’a jamais estimé utile de discuter de la réalité d’une telle décision verbale. Il doit donc être regardé que le maire de la commune de Cholet a pris une décision verbale, qui n’a donc pas fait l’objet d’une publication officielle et a été portée à la connaissance des administrés par voie de presse, qui n’est pas motivée et qui édicte, à compter du vendredi 24 avril 2020, une interdiction générale de circuler entre 22 heures et 5 heures sur l’intégralité du territoire de la commune de Cholet et ce pour une durée indéterminée.
(.../...) La décision verbale prise le 24 avril 2020 par le maire de la commune de Cholet n’est pas (.../...) justifiée, dès lors que la commune, qui n’a jugé utile ni de produire d’observations écrites, ni d’être représentée à l’audience publique du 28 avril 2020 à laquelle elle a été dûment convoquée, ne fait valoir aucune circonstance nouvelle qui serait apparue ce 24 avril, ni ne tente même d’expliquer en quoi la réduction marginale de la durée de l’interdiction de circuler serait de nature à rendre cette nouvelle mesure, ni motivée, ni régulièrement publiée et prise sans limitation dans le temps, acceptable au regard du respect de la légalité et des libertés fondamentales. Par suite, la Ligue des Droits de l’Homme est fondée à soutenir que la décision verbale prise le 24 avril 2020 par le maire de la commune de Cholet a porté, de manière grave et manifestement illégale atteinte à la liberté d’aller et venir et à la liberté personnelle des personnes appelées à se déplacer sur l’ensemble du territoire de la commune de Cholet."